Qui sont les ambassadors pour VMS ?

, par Gérard Calliet

Il y a assez longtemps que j’ai dépassé la soixantaine. Je ne me souviens pas avoir jamais accepté de mendier pour travailler.

L’écosystème VMS a été de longue date un système élitiste. Dans une certaine mesure une sorte de contre modèle du mode d’existence des mondes Linux. Il n’est pas très difficile de constater qu’un de ces deux modèles a eu plus de succès que l’autre.

Néanmoins l’extrême qualité des produits, le professionnalisme des acteurs restent des mobiles suffisants pour décider de continuer à trouver des emplois dans le domaine. Recherche plus que difficile quand l’écosystème est un centre jaloux, et que la cooptation est souvent une barrière infranchissable.

Il y a aussi des moments où l’intelligence des situations est reconnue, même hors du cercle de l’élite constituée. Quand la mort de l’écosystème avait été prononcée par HP en 2013, mon action m’avait valu l’honneur d’être nommé ambassador par Sue Skonetski. Je suis donc un ex-ambassador.

Je ne demanderai pas à rejoindre le nouveau corps des ambassadors. VSI semble se demander comment assurer une communication avec ses utilisateurs. Il serait temps, après dix ans de se poser ce genre de question. Et en France où une association héritière de DECUS, créée spécialement pour le retour de VMS, VMSgenerations, essaie assez vainement de se faire entendre, on est en droit de savoir quel mode de communication est souhaité par VSI.

Comme j’ai pu le dire ailleurs, il y a toujours des problèmes dans les processus de reprise. Perdre les acquis parce qu’on n’a pas analysé les qualités de ce qui est repris, rejouer les erreurs qui ont mis le système en danger.

Une des faiblesses de l’écosystème VMS a été la sanctuarisation du domaine d’excellence et de décision. Ce mode date des débuts de DEC, quand la génialité des lancements devait être protégée. Il est peu à peu devenu un frein à la reconnaissance universelle des qualités de VMS. Quand les activités ont commencé à s’épuiser il a accéléré le recroquevillement de l’écosystème.

VSI n’a pas pris la mesure de ce danger. Et au lieu de faire la récolte de tout ce que le centre avait délaissé, mais qui était une ressource réelle de relance, VSI a peu à eu procédé à des consolidations successives, pour recentrer encore le centre. Focalisation sur une seule solution, le portage à marche forcée vers x86, sélection de un ou deux acteurs privilégiés, reprise au centre producteur des fonctions de service.

Le lancement du programme des ambassador entre dans cette catégorie d’un fonctionnement élitiste centralisé. Comme j’ai pu l’entendre, VSI restreint la quantité pour améliorer la qualité, on ne diffusera pas au grand nombre, et on constituera un petit nombre d’initiés qui aideront VSI dans ses politiques.

Je dois dire qu’il y a un réel appât. L’ambassador aura des contacts forts avec les développeurs majeurs, des séances de présentations techniques par Camiel Vanderhoeven ou d’autres guru de VMS. Evidemment que pour un professionnel de VMS il y a un désir violent généré par cette offre.
Mais encore faut il faire une petite prière pour entrer. VSI nous demande en quoi nous serons profitables. On entend bien qu’il faut montrer une très bonne volonté pour avoir la grâce d’entrer dans l’élite. Ce qui à nos ages ne s’entend pas bien. Et quand à notre responsabilité de professionnel il est inenvisageable de perdre notre indépendance de jugement.
Hors des problèmes de motivation, ce mode de diffusion d’un savoir sur VMS est totalement archaïque et complètement contre-productif. La culture du secret pour les OS est entièrement dépassée. Elle est un frein à l’adoption de la solution pour des développements Open Source utilisateurs de VMS. Là aussi on garde l’écorce et on abandonne le fruit. VMS était jalousement gardé, mais DEC en produisait une documentation d’une qualité inégalée. VSI ne met pas à disposition des parties essentielles de sont usage de LLVM, parce qu’il n’a pas la ressource pour les documenter, ou ne publie pas ses développements Open Source suivant le même prétexte, mais il va réserver ses secrets à une élite qu’il choisira. Ni publication, ni connaissance, donc.

Je resterai donc un consultant indépendant, qui souhaite à VSI le succès, et surtout aux utilisateurs de VMS la survie de leurs systèmes. Si il y a bien des ambassador de VMS aujourd’hui et depuis des décades ce sont tous les utilisateurs loyaux de ce produit.

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